La transplantation d’organes est devenue en quelques décennies un traitement éprouvé, presque banal, ayant fait la preuve de sa très grande efficacité. Elle représente, pour des milliers de malades, l’unique espoir non seulement de survivre, mais aussi de retrouver une existence simplement normale. Pourtant, l’accès à ce traitement reste restreint en France, en raison de la rareté des organes à transplanter. De ce constat simple à une conclusion hâtive, il n’y a qu’un pas, que le législateur n’a pas manqué de franchir. En ne proposant dans le projet de révision de la loi de bioéthique qu’une micro-évolution (l’autorisation des dons croisés), certes nécessaire, mais à la marge, du dispositif actuel, il considère de facto que la pénurie est une fatalité.
Or, ce postulat est non seulement faux, mais aussi moralement inacceptable.
Faux, puisque certains pays, dont certains très proches, ont su vaincre la pénurie. Les solutions sont connues et efficaces. La France réalise une performance honorable en ce qui concerne le prélèvement sur les donneurs décédés en état de mort encéphalique. Des progrès sont certes encore possibles dans ce domaine, par exemple en diminuant le taux de refus, mais ils ne pourront être que de faible ampleur, la source de greffons que représente la mort encéphalique étant limitée. En effet, une étude récente a montré que seulement 4 000 personnes environ décèdent chaque année en France dans des conditions permettant d’envisager ce type de prélèvements. Nous en recensons 3 000, qui font l’objet d’une démarche aboutissant à un don d’organes dans la moitié des cas. Il en faudrait 11 000 pour espérer répondre aux besoinsde greffe de la population…
Nous sommes en revanche très en retrait sur les deux autres sources de greffons que sont les prélèvements sur des donneurs décédés suite à un arrêt cardiaque et les greffes rénales à partir de donneurs vivants.Si la France veut améliorer l’accès à la greffe de ses patients, elle doit se tourner résolument vers ces deux techniques, comme l’ont déjà fait la plupart des pays médicalement développés, qui se refusent à laisser s’épuiser et mourir leurs malades sur des listes d’attente…